Nouveaux arrêts controversés sur les congés payés

La Cour de cassation a opéré, dans deux arrêts rendus le 10 septembre 2025, un revirement en matière de congés payés afin de se mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne, faisant fi de l’impact sur la compétitivité des entreprises.
Deux nouveautés marquent cette rentrée juridique sur un sujet qui devient épidermique, les congés payés durant un arrêt maladie.
- en effet, le salarié qui tombe malade pendant une période de congés payés a droit au report des congés coïncidant avec la période d’arrêt de travail pour maladie ;
- en outre, le salarié soumis à un décompte hebdomadaire de la durée du travail peut prétendre au paiement des majorations pour heures supplémentaires qu'il aurait perçues s'il avait travaillé durant toute la semaine lorsque celui-ci, pendant la semaine considérée, a été partiellement en situation de congé payé.
Le report coïncidant avec un arrêt maladie
Jusqu’à présent, le salarié qui tombait malade pendant ses congés payés ne bénéficiait pas d’un report des jours de congé coïncidant avec la période de maladie.
Désormais, dès lors qu’un salarié est en congés payés et informe son employeur qu’il fait l’objet d’un arrêt de travail, le décompte des congés en question cesse, ceux non pris faisant l’objet d’un report conditionné à la notification de l’arrêt à l’employeur.
En conséquence, dès réception de l’arrêt de travail, l’employeur sait que l’indemnité de congés payés n’est pas due pour les jours d’absence pour maladie.
Si le salarié transmet son arrêt à la Sécurité sociale dans les 48 heures et respecte également les délais légaux ou conventionnels vis-à-vis de l’employeur, l’indemnisation de la période de maladie se met alors en place.
Les modalités de cette indemnisation dépendent :
- du choix de l’employeur (subrogation ou non dans les droits du salarié aux IJSS)
- de l’ancienneté du salarié
- et des dispositions prévues par la convention collective.
L’employeur doit alors régulariser la paie, informer le salarié et appliquer les dispositions du Code du travail relatives au droit au report des congés payés.
Méthode de mise en application
- faire un signalement DSN d’arrêt de travail
- recalculer l’indemnité de congé payé et, en cas de trop-versé, retenir la part d’indemnités correspondant aux jours de congé payé coïncidant avec la période de maladie
- verser le complément de salaire, si existant, après décompte du délai de carence éventuel
- tenir compte de cet arrêt de travail dans le calcul des congés payés de la période d’acquisition en cours. Un arrêt maladie d’origine non professionnelle permet d’acquérir 2 jours ouvrables par mois au lieu de 2,5.
- informer le salarié, dans le mois qui suit sa reprise après un arrêt de travail, du nombre de jours de congés dont il dispose ainsi que de la date limite pour les prendre. Cette information doit être transmise par un moyen permettant d’attester la date de réception (remise en main propre contre signature ou lettre recommandée avec accusé de réception).
La solution s’applique rétroactivement aux situations passées sous réserve que le salarié ait notifié à l’employeur les arrêts maladie survenus pendant les congés.
Action en répétition de l’indemnité
L’employeur peut réclamer le remboursement d’une indemnité de congés payés versée à tort. La Cour de cassation rappelle que cette action est soumise au délai de prescription de trois ans prévu dans le Code du travail, applicable à toute créance salariale. Elle précise que ce délai commence à courir à la date du paiement de l’indemnité, dès lors que l’employeur disposait, à ce moment-là, des éléments lui permettant de constater l’erreur (par exemple, la réception de l’arrêt maladie) et d’en demander la restitution.
Incidence sur le décompte des heures supplémentaires
Pour rappel, les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile et le calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne tient compte que du temps de travail effectif. Les congés payés ou les jours d’arrêt maladie sont exclus de ce calcul.
Dans son arrêt du 10 septembre 2025, la Cour de cassation estime qu’il convient à présent de tenir compte des jours de congé payé pour déterminer si le salarié a, ou non, accompli des heures supplémentaires. Ainsi, un salarié soumis à un décompte hebdomadaire de sa durée de travail peut prétendre à leur paiement sur la semaine au cours de laquelle il a posé un jour de congé payé et n’a donc pas réalisé 35 heures de travail effectif.
Cette nouvelle règle s’applique dès maintenant aux litiges en cours.
Le Ministère du Travail a actualisé sa fiche dédiée aux congés payés avec ses nouvelles dispositions : https://travail-emploi.gouv.fr/les-conges-payes#anchor-navigation-625
Positions syndicales
La CPME en appelle au nouveau Premier ministre pour que la France défende enfin ses entreprises à Bruxelles https://www.cpme.fr/espace-presse/communiques-de-presse/maintenant-ca-suffit
Le MEDEF déplore vivement ces deux décisions de la Cour de cassation, qui fragilisent encore la compétitivité des entreprises françaises et envoient un signal très négatif à l’heure où notre pays confronté à la concurrence d’un monde ouvert a besoin de travailler plus, et où l’on cherche à lutter contre les arrêts de travail abusifs.
Pour plus de précisions sur les règles de report voir notre précédent article sur l’acquisition des congés payés pendant la maladie.
Contactez le service juridique de l’UPV pour vos questions en droit du travail : juridique@upv.org
Informations juridiques, pratiques, sociales, sur le monde du travail, une réforme, un décryptage de nouvelles mesures, de problématiques de société, un point de vue.
Récemment publié dans la catégorie "En exergue"
